Voulez-vous savoir comment un papillon m'a sauvé ? Bien sûr, cette idée peut paraître stupide aux premier abord, car cette créature si inoffensive ne reflète que la fragilité de la vie.
Mais peut-être qu'à travers cette histoire, vous changerez d'avis et qui sait, vous les regarderez autrement.
Le silence est un ami qui ne trahit jamais.
Née dans une petite ville française, un 15 août 1992, mon histoire ne semblait pas encore condamné d'avance. Jusqu'à mes quatre ans, je passais ma vie aux côtés de mes parents sorciers dans un village situé dans le sud de la France. Bien qu'ils savaient manipuler leur magie, ils avaient décidé , depuis ma naissance, de cesser de l'utiliser. Ils voulaient devenir des parents ''normaux'' et ainsi m'inculquer des valeurs humaines. D’après mes géniteurs, vivre comme eux était synonyme de paix et d'harmonie. Mais parfois, même avec la meilleure volonté au monde, le bonheur peut nous échapper. Un soir, sur la route du retour, après avoir fait les courses , un homme était apparu au milieu du bitume. Ne l'ayant aperçu qu'au dernier moment, mon père freina, si brusquement que notre convoi finit par faire des tonneaux. La voiture s'était finalement retournée sur le toit après s'être immobilisé quelques mètres plus loin.
Encore consciente, je vis l'habitacle se teinter de rouge à certains endroits. Mes parents étaient immobiles, silencieux. Je ne comprenais pas. J'avais tenté de les appeler mais aucun sons ne sortez de ma bouche. C'est alors que j'aperçus les pieds de l'inconnu s'approcher jusqu'à nous puis s’arrêter à notre niveau. Son bras extirpa ma mère sans effort. Quelques secondes après, il la laissa tomber au sol et c'est ainsi que je vis pour la première fois le visage de la mort. Son regard émaner une absence totale de vie. Une trace de sang recouvrait son cou ou son pouls ne battait déjà plus. Puis ce fut au tour de mon père de disparaître et rejoindre ma mère . La peur papillonnait en moi comme une envolée d'oiseaux effrayés.Mais malgré cela, j'avais rejoint mes parents en rampant, tandis que du sang coulait le long de mon visage . Je n'avais pas osé relever la tête, de peur de voir à quoi ressembler le monstre. J'avais enlacé les corps de mes parents comme je le faisais de leur vivant. Le meurtrier s'en était allé, après avoir contemplé ce spectacle quelques instants. Pourquoi ne m'avait il pas tué ? Peut-être par pitié ou par regret qui sait ? Cet homme ou cette femme avait définitivement bouleversé le reste de mon existence. Ce n'est que quelques heures plus tard que les secours sont arrivés . Entre temps, dû au choc sur ma tête, provoquée par l'incident, j'étais tombé dans un profond coma. Ce n'est que quelques jours après que je rouvris à nouveau les yeux. Très vite, les médecins me diagnostiquaient une perte de mémoire. En effet, je me souvenais que de mon nom. Je ne me rappelais pas de mes parents ni de ce qui s'était passé durant cette fameuse nuit tragique.
-C'est plutôt une bonne chose qu'elle ne se souvienne de rien
Avait dit le médecin à mon oncle qui était venu me chercher.
-Je n'ai que faire de votre opinion.Cet homme que je ne reconnaissais pas était pourtant le portrait craché de mon père. J'avais appris plus tard qu'ils étaient jumeaux. Grand, imposant, les yeux sombres , il dégageait une brutalité bien réelle. Dès le lendemain, nous avions pris un avion, direction le Nevada pour Las Vegas. Malgré mon hospitalisation récente, mon oncle me ménageait nullement, enchaînant les heures de vols puis de voitures sans interruption. Je n'osais parler, car son regard haineux me laissait sous entendre qu'il valait mieux ne pas essayer. Très vite, nous étions arrivés à destination, dans le centre ville . Dans l'un des plus vieux lotissements du coin était affiché une pancarte peu accueillante , avec pour logo une clef. Il était écrit ''Bienvenue chez Key '' , tandis que le contour était éclairé par des néons presque en fin de vie. Mon tuteur avait repris l'entreprise familiale qui jusque-là avait perduré . Serrurier de père en fils en France, il avait fini par s'installer au Nevada pour des raisons inconnues. J'avais compris en regardant ce bâtiment à la façade endommagé que notre voyage allait s’arrêter ici, comme ma liberté.
Oublie les blessures, n’oublie jamais la bonté.
J'ai appris à mes dépens que mon oncle était un maléficien. Comment est il arrivait à devenir ça? Personne ne le savait . Ce n'était qu'une part sombre de plus qui entourait cet homme perdu dans une souffrance éternelle. La sécheresse de ce cœur déserté par l'amour avait fait de lui un meurtrier. Il allait se servir de moi comme une arme mais pour cela, il devait d'abord émousser l'objet en question. Il avait comme objectif de m’entraîner jusqu'à ce que mes performances soient satisfaisantes. Utilisant la magie du sang de haut niveau, il s'était mis à me manipuler comme une marionnette. Se servant presque uniquement de mon sang , il pouvait me garder un long moment sous son contrôle. C'est ainsi que j'ai frôlé de nombreuses fois la mort, en essayant d'échapper à son emprise.
-
Vous aurez beau essayer de me soumettre à votre volonté, j’essaierai toujours de vous résister !-Même si je t’arrachais tous tes membres un par un, tu ne changerais jamais d'avis, je l'ai bien compris depuis le début.M'avait il répondu avant de me faire agenouiller de force par sa magie.
-Mais tu devrais savoir que je ne te verrais jamais autrement que comme une arme. Toujours en me contrôlant, il m'infligea à moi-même de ma propre main des vingtaines de gifles. Dans un dernier effort, j'avais réussi à reprendre le contrôle de mon corps et en profitai pour essayer de le frapper. Avant que mon poing ne l'atteigne il me stoppa net. Immobile, paralysé, je ne pouvais plus rien faire.
-Même si tu réussissais à me tuer, ils t'enfermeraient dans un centre psychiatrique car personne aurait cru à tes histoires. Tu serais alors enfermée à vie, consciente que la vérité est ailleurs. Inexorablement ton destin est lié au miens.
-Tu as beau me contrôler , tu n'arriveras jamais à m'enlever la seule chose qui me reste. Avais je dis convaincu, en tremblant de colère.
-Même si arrive à m'enfermer ici toute ma vie, tu ne me briseras jamais ma volonté !
Il m'avait alors frappé à coups de tisonnier pendant des minutes interminables, alors que je ne pouvais pas bouger. Je n'avais que 12 ans lorsque cette altercation s'est produite, finissant par me briser de nombreuses côtes.
Conscient que tôt ou tard mes pouvoirs de sorcière allaient faire surface et lui porter défauts, il s'était dépêché de me faire porter des anneaux en fer. D'innombrables cercles de métal entouraient la plupart de mes membres tandis que des cadenas pendaient à chacun d'eux. Rien ne m'était autorisé à part le silence . Il ne me nourrissait que de ses restes pour m'affaiblir.
-Si tu es trop bien nourri, tes pouvoirs se révéleront incontrôlables et tu risquerais de tuer des innocents. Je ne pourrai le tolérer.Le volume de sa voie s'était amplifié.
-Nous sommes tous des monstres, nous les êtres non-humain. J'en suis devenu un pour tuer tous ceux qui arpentent ces rues et je ne m’arrêterais que lorsque nous aurons fini par être les seuls.Il voulait épurer la société des individus indésirables. Il vouait une haine sans fin contre toutes les races non humaines. Il s'était mis à les tuer bien avant que je sois à ses côtés. Ses prétextes pour cette chasse aux êtres surnaturels comme il les appelle parfois, me sont restés obscurs. Méticuleux, il avait réussi à cacher chacun de ses meurtres mais pas sans en payer le prix. L' utilisation abusive de ses pouvoirs l'avait considérablement affaibli mais maintenant qu'il m'avait avec lui, il allait pouvoir reprendre du service encore un moment.
Notre chasse se déroulait uniquement la nuit pour ne pas être vu. Bien évidemment, on ne tuait personne dans le centre-ville. Il choisissait toujours les quartiers les moins fréquentés à des heures très tardives. Emmitouflé dans des vêtements larges à capuche, nous étions totalement anonyme. Quand toutes les conditions étaient alors propices, le plus souvent, il me blessait pour répandre du sang . D'abord, cela lui permettait de me contrôler et ainsi d'attirer les autres races. Puis une fois la ''proie'' devant nous, je la combattais, diriger par la magie du sang. Bien que je consacre toute mon énergie à épargner leur vie, réussissant parfois à dévier mes coups, le résultat resté en général inchangé. Une fois la victime tuée, ce qui arrivait couramment, il m'enfermait dans ma chambre. Il prenait soin de m'attacher à une dizaine de chaînes de fer pour éviter que je ne m'échappe pas pendant qu'il coulait le corps dans les eaux aux alentours de San Francisco. Je devais attendre parfois toute une journée avant qu'il ne revient. J'ai tenté, à divers endroits et moment de m'échapper, mais il arrivait inexorablement à me contrôler avec sa magie. Jusqu’à mes vingt trois ans, ma vie pouvait se résumer à ces quelques mots : meurtres, douleurs, silence et cage.
Mais tout allait changer et débuter durant une nuit qui semblait comme les autres. Nous étions partis chasser au milieu de la nuit, lorsque dans un coin de rue, une ombre massive était apparue. Mon oncle regardait alors en l'air :
-La pleine lune...La créature avait continué son chemin dans une casse pour voiture. Aussitôt nous l'avions poursuivi. Mon oncle me contrôlait depuis que nous sommes sortis de la maison, après m'avoir poignardé au ventre. Une fois introduit dans l’entrepôt qui contenait un nombre incalculable de carcasses métalliques, la chasse avait commencé. Il utilisa ma magie de la terre à travers moi pour barrer le chemin de la masse sombre en formant un mur solide. Celui-ci s'était retourné en montrant les crocs.Le loup-garou, dicté par son instinct bestial, fonça droit sur moi. Ces êtres imposants m’impressionnaient toujours, bien que ce ne fût pas la première fois que j'en ai rencontré. Rapidement, mon oncle me donna une lame faite d'argent puis m'envoya courir vers la bête. Lorsque la distance devenait critique, à un moment bien calculé, je soulevais un bloc de terre à mes pieds, me projetant en l'air. Le loup-garou glissa avec ses pattes puissantes pour s’arrêter puis bondit pour m'attraper au vol. Mais il eu à peine le temps de décoller du sol que j'utilisais ma terrakinésie pour l’emprisonner jusqu'à la taille . Cloué sur place, j'allais lui infliger le coup fatal en lui plantant ma lame en plein cœur mais contre toute attente, la bête brisa l'étreinte qui l'emprisonnait. Plongeant droit sur lui, vers une mort assurée, mon oncle m'avait fait former un bloc de terre que je projetais contre moi-même. Me déviant avec l'impact, j'étais tombé lourdement sur le sol poussiéreux. Le choc m'avait apparemment brisé une côte vu la douleur qui en découlait. Le loup-garou n'avait pas attendu plus pour se jeter à nouveau sur moi, malgré cela, j'avais réussis à le retenir en projetant d'innombrables rochers contre lui. Sa puissance était telle qu'il réussissait à briser chacun de mes projectiles sans réelle difficulté. Alors qu'il se rapprochait dangereusement, mon marionnettiste s'agenouilla, tandis que des quintes de toux sanglante semblaient l'étrangler.
Ces dernières semaines, il semblait être pris d'un mal incurable. Parfois, il s'étouffait dans son propre sang mais malheureusement, cela ne dure que peu de temps. Encore sous sa manipulation du sang, je m'étais mise à genoux en valsant ma tête au même rythme que lui, l'imitant pendant qu'il agonisait. Il m'était impossible de fuir pendant que je toussais dans le vide. La bête m’avait alors asséné un coup de patte si violent que je finis par rouler des mètres plus loin. Il m'avait déchiré une partie de mon manteau et de ma chemise, frôlant ma peau. Le souffle coupé, j'étais enfin libre de mes mouvements.A peine me suis-je retourné sur le dos que le loup-garou était apparu au-dessus de moi. Ne voulant attendre plus longtemps, je finis par lâcher ma lame d'argent au sol. Pour mes quelques instants de liberté, je ne voulais tuer personne, qu'importe si cela causait ma perte. La créature s'était mise à grogner puis avait levé sa patte pour m’asséner le coup final. Alors que tout semblait perdus pour moi, c'est à ce moment là qu'un papillon sorti de nulle part était apparu. Je n'en n'avais jamais vu auparavant et ce spectacle était l'un des plus beaux qu'il m'était donné de voir. Flottant autour de nos têtes en décrivant des cercles, il s'était arrêté finalement sur le bout du museau du loup garou. L'instant même ou la petite chose s'était posé sur lui, la bête arrêta net son geste et son grondement avaient disparut.
Tous les deux hypnotisés par le papillon qui ouvrait et fermait ses ailes par intermittence, le combat que nous avions entamé nous semblait si loin maintenant. Un tel contraste de forces finalement réunies m'avait décoché un sourire. Mes yeux s'étaient alors posés sur celui du loup garou qui paraissait si humain en cet instant. Convaincu que même les monstres avaient un cœur, ce moment de plénitude m'avait alors conforté dans cette idée. D'un geste lent, j'avais levé mon bras pour caresser la joue de celui qui allait me prendre la vie. Mais cet instant si fragile, ou j'allais toucher la bête, s'envola lorsque je sentis une lame s'enfoncer dans mon ventre. Cet instant fragile changea alors radicalement , laissant place à une douleur plus grande. Mon oncle avait réussi à ramper jusqu'à nous et me planter la dague qui reposait au sol il y a encore quelques instants .
-Tu...tu dois le tuer...Le papillon s'en était finalement allé lorsque les premières gouttes de pluie s'étaient écrasées au sol. Au moment ou j'allais être à nouveau manipulé, le loup-garou avait attrapé mon agresseur, le projetant plus loin. Mon tortionnaire s'était fracassé contre une pile voitures avant de tomber lourdement à terre. La créature m'avait regardé un instant avant de courir vers mon oncle, sûrement pour en finir avec lui.
Grièvement blessé, je m'étais relevé péniblement ,tandis qu'une pluie battante s'abattait sur la ville. Courant pour échapper à mes agresseurs, très vite, j'ai dû me résigner à marcher. J'avais perdu beaucoup de sang et je me sentais faiblir de minute en minute. Le vent soufflait de plus en plus fort, m'aveuglant par moments et consumant encore un peu plus mes dernières forces. Titubant avec maladresse, de nombreuses fois, j'ai dû m'adosser contre les murs de certains immeubles. Finalement, consciente que j'allais finir par tomber inconsciente si je continuais ainsi, j'avais décidé de frapper à la porte de quelqu'un. Complètement trempé, blessé, mes vêtements partiellement déchirés, j’avais que peu de chances que quiconque me reçoit. Mais parfois, l'espoir nous fait avancer à sa manière. Je toquai alors à une porte puis dans un dernier effort, j'attendis.